
Chocolatines
Une légende raconte, qu’en des temps anciens, il y a fort fort longtemps, un jeune boulanger du sud-ouest fut mordu par une chauve-souris (ou un pangolin allez savoir). Atteint de fièvre il délira pendant plusieurs jours au point de tenir des propos incohérents. Partiellement rétabli, il reprit son travail mais qu’elle ne fut pas la surprise de ses clients en découvrant que le boulanger avait débaptisé la plupart de ses pâtisseries qui faisaient pourtant sa réputation à travers le monde entier !
Canelé avait été augmenté d’un “n” pour devenir cannelé ! Pire encore à l’Epiphanie nul gâteau roi ! A sa place une bête galette de pâte feuilletée garnie de frangipane ! Et comble de tous les vices, sacrilège de tous les sacrilèges, crime odieux, la chocolatine avait disparue ! Cette délicieuse viennoiserie garnie généreusement de chocolat avait été remplacé par un vulgaire et commun pain au chocolat bien moins gourmand !
Ulcérés et apeurés devant autant d’affront, les habitants de cette bonne ville chassèrent le boulanger et l’exilèrent hors des frontières de ce si beau pays qu’est la Gascogne.
Le boulanger jura de se venger et entreprit une longue croisade dans le monde pour imposer ses noms à l’humanité toute entière à coup de pâtisseries bon marché ! Et il y arriva à l’exception du Québec, qui, par fraternité avec leur lointain cousins basques, résista à cette grossière manœuvre.
La guerre fut déclarée. Les diplomates et autres ambassadeurs furent relégués à l’arrière-cuisine ! Les religieuses se mirent à prier Saint Honoré et les éclairs sortis, pour être lancés sur les assaillants ! On débaptisa le Paris-Brest en Bordeaux-Dax (tiens c’est une revisite à imaginer ça, en passant !) Rapidement la bataille se transforma en guerre de tranchée, le Sud-Ouest résistant vaillamment à l’envahisseur pendant des décennies, projetant du caramel sur les assaillants du haut des murailles.
Et ils résistèrent si vaillamment que l’espoir se mit à naître jusqu’à devenir victoire ! L’histoire devint une légende. La légende devint un mythe. Pendant 2 500 ans, plus personne n’entendit parler du pain au chocolat.
Et si on veut éviter qu’un nouvel individu (de petite taille) ne tombe pas dessus par hasard il faut rester vigilant et ne pas baisser la garde. Alors ouvrons l’œil amis et le bon !
Bon trêve de plaisanteries et redevenons sérieux. Chocolatine, pain au chocolat, couque au chocolat, petit pain au chocolat…. autant de nom pour un seul produit. Et quelle importance au fond ? Après toute le plus important justement n’est-il pas de se faire plaisir en mangeant cette délicieuse viennoiserie ? Alors quelque soit le nom que vous lui donniez j’espère que cette recette vous plaira et que vous vous amuserez bien en la réalisant. En prenant son temps c’est bien moins effrayant qu’il n’y parait !
Une dernière chose cependant, si cette “guéguerre” nord/sud prête à sourire, elle doit justement rester dans cet esprit d’amusement ! Que l’on continue donc allègrement de se chambrer dans une atmosphère bon enfant mais par pitié nul besoin d’étaler une science qui n’en serait pas une (quel que soit le camp) qui viserait à prouver par a+B que c’est comme ça qu’on dit et pas autrement. Aucun document historique ne permet de prendre position. Et c’est très bien comme ça ! Longue vie donc aux pains au chocolat et aux chocolatines !
Mais pour moi ça restera chocolatine ? !
Au point pour la petite anecdote (dont tout le monde se fout) d’avoir remplacé, pendant l’épreuve technique du CAP, sur le tableau d’ordonnancement le terme pain au chocolat par chocolatine. C’est sûrement pour ça que je n’ai eu que 11/20 ? (sûrement pas à cause de mes piètres qualités de décorateur et finisseur)
Pour 6 chocolatines
Recette de Sébastien Lagrue
Technologie

Alliance


Conseils & Organisation
Les chocolatines se font donc avec une pâte levée feuilletée. Vous pouvez retrouver la recette de la pâte dans les bases si vous souhaitez créer des recettes personnelles de viennoiseries.
Pour une meilleur qualité gustative il est préférable de réaliser la détrempe la veille puis de façonner la chocolatine le jour même.
N’hésitez pas à mettre régulièrement votre pâte au frais ou au congélateur dès que vous sentez que le beurre commence à chauffer. La pâte se travaillera plus facilement bien froide. Veillez à bien fariner, mais sans trop d’excès, le plan de travail pour que la pâte n’accroche pas.
La pâte est prévue pour 6 chocolatines environ. C’est la dimension de vos bâtons en chocolat qui vous donnera la largeur de vos chocolatines. Veillez simplement lorsque vous abaissez la pâte à obtenir un rectangle d’une épaisseur de 3 à 4 mm. L’épaisseur est toujours plus importante à respecter que les dimensions qui vous sont données.
Si vous souhaitez doublez les quantités je vous conseille de ne réaliser qu’une seule détrempe (en multipliant bien sûr les quantités par 2) mais de la diviser avant son repos au frais pour la nuit puis de procéder comme suit avec deux abaisses et deux beurres de tourage. La méthode est plus longue mais plus facile pour obtenir une pâte fine sans appuyer trop fortement et écraser le feuilletage.
Si vous trouvez, essayez enfin d’avoir une farine de force (dite de gruau) à la place de la T45.
Enfin vous pouvez congeler vos chocolatines une fois cuites bien protégées puis les réchauffer dans un four préchauffé à 150°C pendant une dizaine de minutes.
Vous pouvez également les congeler une fois façonnées puis les sortir la veille au soir et les laisser lever toute la nuit à température ambiante. Il ne vous restera plus qu’à les dorer au réveil et à les cuire. Et comme ça à vous les chocolatines fraîches au petit-déj !
Ingrédients
Pâte fermentée :
- Farine T45 : 130 g
- Farine T55 : 130 g
- Sel : 5 g
- Sucre : 30 g
- Miel : 5 g
- Eau : 80 g
- Lait : 50 g
- Beurre : 25 g
- Levure fraîche de boulangerie : 10 g
Beurre de Tourage :
- Beurre sec : 120 g
Finition :
- Œuf : 1
- Lait : 2 c.à.s
- Bâtons de Chocolat : 12 (2 par chocolatines)
- Sirop à 60°B (facultatif, réalisé avec 20 g d’eau et 30 g de sucre)
Matériel
Le tout-venant :
- Cul-de-poule
- Balance électronique
- Rouleau à pâtisserie
- Fouet, Maryse & Spatules
- Corne & Coupe-pâte
- Papier sulfurisé
- Papier-film de qualité
Pour la recette :
Appareils (électriques) :
- Robot pâtissier
La Recette
Pâte Fermentée :
Dans la cuve du robot versez la levure émiettée puis les farines tamisées, le sucre, le sel, le miel, les 25 g de beurre (froid), le lait et l’eau. [simple_tooltip content=’Cette méthode permet d’être sûr que la levure ne soit pas en contact avec le sel (qui la tue) ou le sucre (qui l’active) avant le pétrissage‘]??[/simple_tooltip]
Amalgamez les ingrédients 3 minutes en première vitesse puis pétrissez durant 6 à 8 minutes en deuxième vitesse.
Formez alors une boule et laissez-la se détendre 15 minutes à température ambiante puis écrasez-la pour lui donner une forme rectangulaire en prévision du tourage futur.
Filmez et placez au frais pour la nuit (ou au minimum 6 heures).
Beurre de tourage :
Réalisez un patron rectangulaire de 14*18 cm dans une feuille de papier sulfurisé en la pliant sur les deux côtés.
Déposez le beurre de tourage bien froid au centre du patron et tapez-le avec le rouleau pour lui donner une forme rectangulaire de longueur 18 cm.
Fermez le patron sur le beurre.
Retournez le patron et à l’aide du rouleau étalez le beurre sur toute la surface du rectangle pour obtenir un beurre d’épaisseur uniforme.
Placez au frais également pour la nuit. [simple_tooltip content=’Cette étape peut être faite le lendemain en utilisant le beurre immédiatement s’il reste souple ou en le plaçant quelques minutes au congélateur‘]??[/simple_tooltip]
Enchâssement du beurre de tourage :
Sortez la pâte fermentée et la plaque de beurre du frais.
Etalez la pâte de telle manière à obtenir une abaisse rectangulaire d’environ 30*18 cm. [simple_tooltip content=’On cherche ici à emprisonner le beurre. Pour cela il faut que la largeur de l’abaisse soit la même que la longueur du beurre (18 cm) et que la longueur de l’abaisse soit légèrement supérieure (30 cm) au double de la largeur du beurre (30 = 14*2 +2 cm) car il ne faut pas oublier que lors de l’enchâssement, une partie de la pâte sera collée à l’épaisseur du beurre.‘]??[/simple_tooltip]
Placez ensuite le beurre de tourage verticalement au centre de cette abaisse de façon à ce que le beurre occupe toute la largeur.
Repliez les deux côtés de l’abaisse sur le beurre (comme des volets) pour l’envelopper intégralement. N’hésitez pas avec les doigts à étendre la pâte pour tout recouvrir. A l’aide du rouleau appuyez légèrement pour souder les deux “volets” refermés de l’abaisse.
Ouvrez le feuilletage en coupant à l’aide d’un couteau bien tranchant les deux côtés de l’abaisse. [simple_tooltip content=’Pour casser la force de la pâte ce qui permet d’obtenir une pâte plus régulière et un beurre uniformément réparti.‘]??[/simple_tooltip]
Appuyez alors légèrement avec le rouleau sur la largeur inférieure de la pâte puis sur la largeur supérieure. Cela va créer un creux.
Appuyez alors à nouveau sur le sommet du creux inférieur de manière à en créer un deuxième à l’intérieur de l’abaisse. Recommencez la même opération sur ce deuxième creux et ainsi de suite jusqu’à arriver au creux supérieur. [simple_tooltip content=’Pour étaler la pâte de façon régulière et bien droite au départ.‘]??[/simple_tooltip]
Réalisez deux fois cette opération.
Abaissez la pâte jusqu’à obtenir un rectangle environ 4× plus long que large. Pour plus de facilité partez toujours du centre de l’abaisse et ramenez le rouleau vers vous puis retournez la pâte et recommencez l’opération avec l’autre moitié.
Lorsque l’abaisse devient assez longue n’hésitez pas à la faire pendre sur le bord de votre plan de travail. [simple_tooltip content=’Pour “casser” l’élasticité de la pâte et diminuer sa rétractation‘]??[/simple_tooltip]
Tour double :
A l’aide d’un pinceau ou d’une brosse retirez l’excédent de la farine puis mouillez la surface légèrement avec de l’eau pour lui permettre de mieux adhérer lors du tourage.
Repliez alors votre abaisse en deux pour visualiser la position de la moitié de la longueur.
Dépliez la pâte puis rabattez le côté inférieur jusqu’au centre et faites de même avec le côté supérieur.
Rabattez alors ce nouveau côté supérieur sur le côté inférieur.
Ecrasez légèrement au rouleau (comme précédemment) juste une petite fois pour permettre un refroidissement plus rapide.
Filmez au contact et placez au congélateur durant un bon quart d’heure.
Tour Simple :
Positionnez l’abaisse ouverture sur le côté droit comme s’il s’agissait d’un livre.
Abaissez à nouveau l’abaisse de façon à obtenir cette fois-ci un pâton 3× plus long que large.
Rabattez le tiers inférieur de la pâte sur le tiers central puis faites de même avec le tiers supérieur.
Placez à nouveau au congélateur pour 15 minutes.
Abaisse & Découpes de la pâte :
Etalez le pâton en forme de rectangle environ 1,5 fois plus long que large sur une épaisseur de 3 à 4 mm. [simple_tooltip content=’Les dimensions importent peu, le plus important c’est l’épaisseur ! Ne vous acharnez jamais sur la pâte en tentant vainement d’obtenir les quelques cm qu’il manquent pour coller à la recette des chefs. Eux le font rarement au rouleau mais plutôt au laminoir !‘]??[/simple_tooltip].
Faites reposer 10 minutes au congélateur puis parez les côtés de l’abaisse de pâte en vous aidant d’un cutter.
Pliez la pâte en deux sur la longueur pour visualiser son milieu puis, au cutter, découpez pour pour obtenir deux rectangles.
Façonnage des chocolatines :
C’est la dimension de vos bâtons en chocolat qui va vous donner la taille de vos chocolatines.
Déposez les bâtons de chocolat les uns à la suite des autres (ils doivent presque se toucher) sur la nouvelle longueur supérieure de vos deux abaisses de pâtes.
Réalisez des encoches au niveau des extrémités des bâtons (longueurs supérieure et inférieure) puis retirez ces derniers et détaillez vos chocolatines. [simple_tooltip content=’Pour des chocolatines XXL vous pouvez allonger dans la longueur vos pâtons à l’aide du rouleau.‘]??[/simple_tooltip]
Utilisez les chutes de feuilletage restant pour réaliser des petites fleurs de croissants (voir bonus).
Commencez à roulez la chocolatine juste en enveloppant le bâton de chocolat avec la pâte puis arrêtez-vous.
Soudez alors le rouleau à la pâte en déposant un deuxième bâton de chocolat sur la jointure de pâte. Soyons gourmand ! Une chocolatine c’est deux bâtons et pas un ! C’est peut-être ça la différence avec le pain au chocolat.
Continuez alors de rouler la chocolatine en serrant bien (sans écraser non plus, comme une bûche).
Humidifiez légèrement à l’aide d’un pinceau la longueur inférieure sur 1 à 2 cm puis roulez intégralement en appuyant ensuite légèrement dessus pour la souder.
Apprêt et cuisson :
Faites lever les chocolatines au moins deux heures, dans un endroit tiède (environ 27-28°C pas plus au delà la levure meurt) jusqu’à ce qu’ils doublent de volume. Cela peut prendre moins ou beaucoup plus de temps. Pour la recette avec prise en photo cela a pris environ 2h30 ! [simple_tooltip content=’Vous pouvez par exemple utiliser votre four en plaçant une casserole d’eau bouillante (en la retirant après quelques minutes) dans le lèchefrite pour créer l’atmosphère tiède et humide.‘]??[/simple_tooltip]
Préchauffez le four à 175°C en chaleur tournante.
Une fois levées, dorez-les avec un mélange œuf/lait en veillant à ne pas trop en mettre sur les côtés ce qui pourrait empêcher de libérer le feuilletage.
Enfournez pour 14 à 16 minutes. Les chocolatines doivent ressortir bien dorées ! Faites les refroidir sur une grille.
Bonus : recyclage des chutes
Les chutes de pâte ne se jettent surtout pas ! Deux astuces pour les recycler :
Détaillez-les en une petite brunoise puis :
- Soit vous les insérez dans la chocolatine au moment du roulage.
- Soit vous les saupoudrez d’un peu de sucre cassonnade. Placez-les dans un ramequin beurré et faites cuire pareillement que les croissants. Vous obtenez alors une sorte de fleur de croissants !